Retrouvailles mouvementées (PV Norrington)

Norrington en blêmit presque.Un frisson le parcourut,et inexplicablement,un froid étrange serra son coeur tel un linceul hivernal.Oui,il savait et comprenait qu'il s'était mis tout seul dans le pétrin.Mais n'arrivait pas à l'admettre.Pour un fois,James n'était pas la victime,mais l'exécuteur,le futur bourreau,et cette idée,il la tenait en une parfaite horreur.

-Non,je ne crois sincèrement pas,Astrée,répondit le militaire,et une intense appréhension se lisait dans ses yeux.Car cela ne fait que me rappeler un peu plus à quel point je vous mets dans une situation détestable...Si près de la EITC,à attendre un choix que ma lâcheté prédestine comme terrible de conséquences.La véritée ? Je ne sais qui écouter,qui suivre,qui espérer.Je ne suis même plus à même de vous donner espoir,car je sais...Que je vous mens peut-être...Oh,Ciel,quelles atrocités suis-je sur le point de commettre...

Au nom du sentiment censé être le plus beau du monde,celui apportant le plus de bonhur et comblant une vie...Le regard d'Astrée était si beau,si doux,si pénétrant que le britannique dut détourner la tête,troublé,démuni,désespéré.Un peu de courage,que Diable ! Il avait affronté la mort en face,alors une décision,comme il en prenait tous les jours,pour un oui ou pour un non ! Le militaire signait des papiers,paraphait des dossiers,rédigeait des comptes-rendus...Décidait de se lever le matin,choisissait quelle chemise mettre,alors trancher cette question-ci...Si fatidique,si tragique...Non,finalement,après réflexion,c'était la pire chose qu'on lui ai jamais demandée de faire.Et un jour,il le ferait,c'était inévitable,et certainement bien le plus terrifiant.Ne pouvoir lutter contre la Destinée,les mots déjà écrits,les faits déjà ébauchés pour soi était d'un rageant...!

-Il y a longtemps,je n'ai su comment comprendre comment Elizabeth avait pu m'utiliser,me tromper en m'assurant de son inconditionnel amour,en acceptant de m'épouser uniquement pour sauver le véritable homme de ses rêves,celui pour qui son coeur se dédiait réellement...Par quelle force insondable elle s'était résolue à me sourire pour mieux me convaincre de sa sincérité...Mais désormais,je sais...A quel point sa position était insoutenable...A quel point elle devait se sentir mal,écartelée entre une duperie à rendre crédible et son unique passion...Désormais,oh oui,je la comprends...! Je saisis l'horreur de l'atmosphère dans laquelle elle était noyée,et qui m'étouffe maintenant,lentement telle un lierre que j'ai moi-même engendré.Peut-être parviendrez-vous un jour à me pardonner mon impuissance.Mais je ne m'excuserais jamais.Jamais...

Parceque Norrington était un homme d'honneur,et qu'il attachait tant d'importance à jouer dans les règles qu'il en oubliait que l'erreur ouvait parfois être humaine.

Baissant les yeux tout en écoutant James parler, ce fut avec un sourire qu'Astrée les reposa sur l'Amiral . Cet homme n'avait pas le droit de souffrir autant, d'être déchiré entre plusieurs passions, dont il ne pouvait toutes les nourrir .
La jeune femme replaça pensivement une meche de cheveux derrière son oreille droite . Elle repensait à son passé, à toutes les atrocités qu'elle avait faites, qu'elle avait subite .. Secouant la tête, Astrée s'excusa precipitemment .

"Non James, vous n'avez pas à vous pardonner !" s'exclama-t-elle, en l'observant et en fronçant les sourcils .

Se retournant, et faisant quelques pas dans la pièce, toujours de dos à l'Amiral, la jeune femme était en train de réaliser que c'était entierement de sa faute . Elle n'aurait jamais du .. Ce n'était pas dans ses habitudes, alors que s'était-il passé ? Dans cette ruelle ? Le coup de foudre ? Un acte incensé, dont elle n'avait pas réflechit aux conséquences ...

"C'est à moi de m'excuser James, sincèrement . Vous avez déjà bien trop de choses à faire, et à regler, ne serait-ce que dans votre coeur, pour que je puisse l'ignorer . C'est ainsi que je puis vous le dire : je peux disparaître de votre vie James .. Il ne suffit qu'a me donner votre accord, et du jour au lendemain, vous n'entendrez plus parler de moi . Peut-etre est-ce brutal comme solution, mais c'est bien la seule et unique qu'il vous reste, pour souffrir déjà un peu moins de ce choix, que vous ne pouvez prendre . Vous comptez beaucoup pour moi James .. Alors croyez-moi, même si je n'ai pas votre accord maintenant, et que je vois que plus tard, la situation ne semble s'arranger, je partirais ."

Croisant les bras, comme si elle avait froid, Astrée baissa de nouveau les yeux, même si James ne pouvait le voir . Oui, elle l'aimait, et c'est bien pour ca qu'elle disparaitrait de sa vie si rien ne s'arrangeait . Il était inutile de le faire souffrir encore plus .

Magnifique,ils allaient passer le reste de leur vie à s'attribuer les défauts de leur histoire.Être désolé,c'était bien beau,mais en attendant,des mots d'amour n'étaient point échangés,de beaux projets n'étaient pas fait,en un mot,c'était le surplace complet...Non,tous deux méritaient plus de bonheur que ce qu'une culpabilité sans fin pouvait offrir ! Assez de tourments secouaient le globe pour que l'on s'en rajoute sciemment.Un peu d'espoir,un peu d'optimisme ! James et Astrée voulaient se battre l'un pour l'autre,mais les difficultés rencontrées faisaient sans cesse de leur idylle une remise en question.
Norrington voulut la réconforter,lui signifier par tous les moyens possibles,porté par son coeur lui-même noyé d'un amour soudain impétueux et presque désespéré,et fit un pas en avant,vers la jeune femme...Mais rien de plus.Il y avait dans ses yeux détournés comme une barrière invisible.Dans ses mots une nouvelle forme de distance,présentée comme future."Si la situation ne semblait pas s'arranger".Comme si cela était une éventualité tout à fait plausible,une possibilité envisagée avec beaucoup trop de pragmatisme.Et dans la bataille contre laquelle on ne jetterait pas ses dernières forces,pour préférer baisser les bras,en se disant à moitié perdant dès le départ.C'était faux,mais d'un autre côté...Par cette résolution...Elle laissait entendre que la séparation serait dure mais tout à fait possible,qu'il fallait qu'il arrête d'espérer pour voir les chances se trouvant contre eux.
Les espoirs du militaire prirent un coup dans l'aile,tout comme son entrain à se plier en quatre avec plaisir.Sans savoir pourquoi,il lui paraissait apercevoir les prémisses d'une nouvelle Elizabeth.Capable de claquer la porte sans périr pour sa cause.

-Comme il vous siéra,répondit-il,pensif et morose.Je vous demanderai simplement de me laisser un mot ce jour-là,pour ne pas que je me lance à retourner chaque grain de sable des Caraïbes pour vous retrouver alors que vous songerez que ça ne vaut plus la peine d'y croire.Pour le moment,je n'ai rien de mieux à vous proposer que du whisky.

L'Amiral se rabattit vers le bureau,sans poser les yeux sur Astrée.La bouteille remplit deux verres,et il vida le sien d'un trait,avant de regarder dans le vague,sombre.L'anglais s'était promis de ne boire que très rarement,désireux de ne plus retomber dans l'alcoolisme.Mais visiblement,puisque l'histoire semblait se répéter,un petit écart ne le tuerait pas.Et puis zut,s'il devait finir tout seul pour ne pas avoir réussi à accomplir un miracle,et bien au moins il le serait en étant sobre.Car même avec la meilleure volonté du monde -celle de James étant actuellement un peu refroidie-,la fugitive et lui n'avait pas d'immenses probabilités de vivre un happy end en bonne et dûe forme.

Levant les yeux vers l'Amiral, Astrée l'observa quelques instants . Peut-être avait-elle été trop négative .. Peut-être n'avait-elle songé qu'a elle sur ce coup-là .. Egoïste . Voilà le seul mot pouvant qualifier Astrée en l'instant même .
S'approchant de James une fois quelques paroles échangées, la jeune femme l'observa vider son verre avec un froncement de sourcils . Delicatement, elle lui eneleva le verre vide des mains, le posant sur le bureau de l'Amiral .

"James .. Une fois de plus, je me suis trompée . J'ai parlé trop vite . J'ai vue tellement de choses horribles dans ma vie, que je ne suis guère habituée au bonheur . Mais vous avez raison . Tout être possède des rêves . Alors autant tout faire pour les réaliser ."

Un sourire . La jeune femme devait rester fixée sur une idée . Et cette idée, la voilà . Elle ferait tout, oui tout, pour acceder au bonheur . Et pour que James y accède aussi . Ainsi, s'il ne voudrait pas qu'elle parte, elle resterait à ses côtés . Elle l'aiderait . L'aimerait . Sans cesse . Sans un seul instant de répis . Là était la clef .

"Jamais je ne vous abandonnerais . N'est-ce pas ce que je vous avais dis, il y a quelques temps ?"

Bien sûr que oui,Astrée l'avait dit.James avait cnservé précieusement ces paroles au fond de son esprit et au creu de son coeur,se les repassant en boucle pour mieux se donner du courage.Seulement elle avait aussi dit d'autres choses par la suite,bien moins rassurantes,bien moins agréables à recevoir.Celles-ci,Norrington aurait aimé ne jamais les savoir perçues,les oublier instantanément,les rayer sans regrets de sa mémoire.Mais il ne le pouvait pas.
Face à cette contradiction,l'anglais ne savait plus trop sur quel pied danser,si bien qu'il baissa la tête en soupirant.

-Je vous crois,Astrée.Je vous crois sincèremnt,quoi que vous disiez,quels que soient vos arguments.Pour un cas comme pour l'autre,vos positions sont mises en place avec tant de détermination...Comme si l'avenir ne pouvait plus vous réserver aucune surprise,comme si vous ayez déjà prévu chaque chose à faire pour chaque possibilité.Ce qui me chagrine,c'est que vous avez parfaitement raison.Nous allons au devant d'ennuis et de difficultés,et je ne veux rien voir.J'en ai assez de devoir sans cesse tout sacrifier sans obtenir quoi que ce soit à la fin.J'ai besoin de stabilité,comme vous.

Et l'espoir,surtout ! De motivations,de lignes d'arrivée qui ne reculaient pas en même temps que lui avançait vers elles...Se tromper,cela arrive à tout le monde.Il n'y avait pas que les faux pas qui blessaient,malheureusement,mais aussi l'absence de certains gestes.
A cet instant,un garde entra : avait-on des consignes pour lui ? Sans paraître le moins du monde supris ou destabilisé par cette arrivée impromptue,l'Amiral rassembla quelques papiers et les lui tendit,avant de lui demander platement :

-Veuillez apporter ceci au capitaine chargé de la surveilance du port,je vous prie.Et menez donc cette jeune personne jusqu'à la meilleure auberge de la ville afin qu'elle y prenne une chambre.Je m'occuperai de régler la note.Demandez également au médecin de passer l'examiner.Une mauvaise chutte de cheval ne doit jamais être laissée sans surveillance,c'est bien connu.

La sentinelle fit claquer ses bottes sur le parquet ciré,avant d'ouvrir la porte à la demoiselle.James,durant ce laps de temps,plongea ses yeux dans ceux de la jeune femme : elle pouvait -et même devait- aller se reposer;ils se reverraient plus tard.

De la stabilité . Oui . Savoir voir plus loin, mais pas trop non plus . Astrée devait se remettre en question . De longues durant, elle n'avait jamais connue ni vécue une vie dites paisible et normale . Il fallait qu'elle songe à présent à rentrer dans cette dernière, qui était accessible .
Plongeant son regard dans celui de James lorsque la sentinelle alla ouvrir la porte, la jeune femme observa l'Amiral . Regards échangés . Elle se rendait compte de son comportement assez vacillant en cette journée . Elle devait se reposer, mais elle aurait preferé finir la conversation avant . Ainsi présentée, elle avait l'impression de se faire jeter dehors . Mais tant pis . Dernières paroles . A voix basse .

"Vous savez mes sentiments au sujet de votre personne James .. Vous savez qu'ils ne changeront pas .."

Tournant les talons, croisant de nouveau les bras, Astrée suivit la sentinelle et, au niveau de la porte, la jeune femme adressa un dernier regard à l'Amiral . Un dernier échange . Le repos l'attendait . La peur aussi . Tout comme une vie désormais paisible .

Je t'aime.C'est tout simple,terriblement touchant,et cela prend autant de temps à prononcer qu'à dire "comment vas-tu ?".Ou alors,légère variante,si les mots vous manquaient sous le coup de l'émotion,un tendre baiser,sur la joue ou sur les lèvres,pour témoigner la force d'une passion,la pureté des sentiments,l'éternel lien qui rattachaient deux personnes s'aimant.C'était toujours ça de prix,une dose de bonheur quoi qu'il arrive,un petit plaisir par chance encore légal et légitime,de l'espoir et de la douceur en réserve pour les jours où la lumière ne pourrait traverser l'épaisse couche nuageuse et grise des époques sombres...
James se contenta de suivre des yeux l'ex-tueuse,le regard un peu vide,l'esprit légèrement ailleurs,le coeur gonflé d'un étrange sentiment à la fois amer et plein d'espérance.Et lorsqu'il fut seul,complètement seul avec ses pensées,il se demanda s'il n'en demandait peut-être pas un peu trop.C'était vrai,il était possible qu'il ait une vision de la notion de couple bien différente de ce à quoi pensait Astrée ! Pour Norrington,l'amour était quelque chose de transcendant,de tellement fort qu'on ne pouvait que l'exprimer chaque jour,à travers chaque regard,sous le couvert de chaque mot.C'était un état duquel vous ne sortiez jamais -sauf en cas de rupture-,et dans lequel vous évoluiez sans interruption avec la personne chérie.Enfin,ça,c'était le point du militaire.La jeune femme voyait éventuellement les choses différemment,de manière plus chaste,moins exaltée,plus désillusionnée.Oui,il se l'avouait à présent,il s'emportait parfois à ce sujet...! Après tout,la demoiselle n'était peut-être pas totalement faite pour ça,et lui pour contenir sa tendresse...Le britannique n'était éventuellement qu'un romantique trop rêveur,et la villageoise ne faisait pas partie de celles que l'on pouvait épouser...
Après un gros soupir,que seul le silence entendit,l'Amiral se laissa tomber sur sa chaise,puis,pour s'occuper l'esprit et les mains,débuta la rédaction d'une autorisation destinée au responsable du port et lui permettant d'inspecter chaque navire quittant les docks.Le grattement léger de la plume sur le papier calma peu à peu ses doutes,si bien qu'il ne pensa plus à ce qui venait de se passer.Ne pensa d'ailleurs plus à rien.C'était tellement plus simple,comme ça...